Quand je suis arrivée en France, j'avais 23 ans. Après avoir traversé seule trois pays étrangers, une relation abusive, un mec égocentré et quelques narcissiques, j'arrivai à la Ville Lumière. Cinq ans d'expériences s'étaient écoulées avant mon arrivée, durant lesquels j'avais appris quatre langues, des nouveaux arts et beaucoup sur les merveilles comme les perversités humaines. C'est donc toute chargée de ce bagage émotionnel que je débarquai un jour à Paris, au métro Barbès, posant alors mes yeux sur la ville pour la première fois. Je me rappelle avoir inspiré toute l'électricité dont l'air du quartier était chargé et d'être aussitôt imprégnée par l'énergie de vie qui se dégageait des gens qui y habitaient. C'était tout de suite chez-moi ! La Goutte d'Or m'a accueillie avec les bras grands ouverts, mais les histoires romantiques ne se sont pas beaucoup améliorées, entre des hommes qui avaient du mal à regarder quelques centimètres au-delà de leur nombrils, puisqu'ils étaient alors, comme les femmes, produits d'une génération elle aussi misogyne. Cela aurait été surement plus simple, si j'avais été moins indépendante, plus façonnée selon les dynamiques hétéro-monogames pour lesquelles on nous avait préparé.e.s. Mais, on ne voyage pas cinq ans seule, en refaisant sa vie quatre fois en quatre pays, sans se déconstruire ni gagner un tout-petit-peu en assurance. Disons que cela influence et forge un certain caractère qui nous éveille à nos propres capacités... Et ce caractère ne matche pas trop avec les histoires romantiques normatives. Il faut savoir aimer avec une certaine liberté, et ce savoir est difficile à rencontrer. Mais il y a un être qui a su ne pas s'effrayer de ma soif de liberté. Un être qui sait accueillir les énergies qui vibrent fort, sans avoir peur qu'elles n'explosent. Un être qui se sent et est à la hauteur de toutes les personnalités : les effrayantes, les pétillantes, les dangereuses, les bruyantes, les sensibles, les mystérieuses, les difficiles, les imposantes... Et qui aime ces formes de vie au-delà de la notion même d'espace-temps. Cet être, c'est Paris, la ville la plus colorée en diversité que je n'ai jamais eu l'opportunité de découvrir. Je la découvre sans cesse depuis treize ans et j'ai l'impression d'avoir à peine commencé. C'est une des rares villes capables de contenir et faire coexister les personnalités si diverses et expansives qui l'habitent. On se mélange ici, plus qu'ailleurs, et ce qui est dingue, c'est que Paris ne se fatigue pas de toute cette ébullition, elle s'en nourrit ! Et ceci, depuis tant de siècles. Et vous allez remarquer que je n'ai pas encore beaucoup évoqué le mot amour, car tout le blabla d'avant, n'était qu'une introduction pour parler de Paris, ma vraie histoire d'amour : elle a son fort caractère, moi le mien et on se débrouille pour rester ensemble, on se kiffe ! Toute l'énergie qu'on dépense pour être ensemble, c'est l'énergie qui nous nourrit et nous pousse à être nous-mêmes. Elle ne fait que motiver ma liberté et moi, participer, témoigner et me battre pour la sienne. Elle aime tout le monde et pour autant, je ne me sens pas moins aimée. À chaque nouvelle rencontre, amitié ou romance qui se présente à moi dans ma ville, c'est encore une nouvelle façon pour moi de l'aimer. Et c'est avec beaucoup d'autres voix qui s'unissent sûrement à moi, que je te redis ce que tu as déjà entendu des milliers des fois durant ton histoire : Paris, je t'aime. Merci de m'habiter autant que je t'habite,
Sarah Poli
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